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dimanche 27 octobre 2013

LA CHAMBRE DES CLOWNS DE LA REPUBLIQUE

L’Assemblée nationale, une foire d’empoignades ! Quelle rupture ?kafkein Le spectacle qu’offrent ces jours-ci nos députés va finir par depiter les senegalais — du moins la plupart ou plus la majorite d’entre eux — est décidément indigne de gens qui prétendaient représenter le peuple. Voilà donc, en effet, une Assemblée dite nationale où la foire d’empoignade est la règle d or, où le chantage est érigé au rang d’argument suprême, où le nomadisme intra groupes parlementaires — du moins lorsque la création de nouveaux est permise — est en passe de constituer un sport national. L’Assemblée nationale, une foire d’empoigne ! Quelle rupture ? De cette 12ème législature, présidée par le politicien retors a souhait Moustapha Niasse (aux affaires depuis l’époque du président Senghormc est a dire post-coloniale !), on s’attendait à ce qu’elle mette en pratique son slogan de rupture, qu’elle nous change enfin des chambres resonnances précédentes où les députés étaient passés maîtres dans l’art de l’applaudimetre, où le Parlement était une chambre d’enregistrement des projets de loi de l’Exécutif et où les débats volaient au ras des pâquerettes. On nous avait promis un nouveau type de député qui contrôlerait sévèrement l’action du gouvernement, qui défendrait réellement les intérêts du peuple, qui prendrait des initiatives dans le sens d’enquêter sur l’utilisation des deniers publics à travers notamment le recours plus fréquent aux commissions d’enquête parlementaire. Surtout, on nous avait dit qu’on allait voir ce qu’on allait voir car, côté hauteur des débats, les députés de cette législature-ci, planeraient au-dessus de leurs prédécesseurs. Au lieu de quoi, on a eu droit, à l’arrivée, à des députés plus voraces encore financièrement que ceux auxquels ils ont succédé, plus aplatis devant l’Exécutif et qui en sont presque réduits à lever le doigt pour demander au gouvernement la permission d’aller au petit coin. De là à oser contrôler l’action de ce gouvernement… Et encore, pour que ce gouvernement-ci fût contrôlé, en tout cas s’agissant de l’utilisation de l’argent public, encore eut-il fallu que cette Assemblée nationale elle-même acceptât de se soumettre à cet exercice. Or, comme le député Thierno Bocoum de Rewmi l’a démontré avec justesse, pendant presque 15 mois aussi bien les questeurs que le président de l’Assemblée nationale ont refusé de se soumettre au moindre contrôle s’agissant de l’utilisation du budget de l’Assemblée nationale ! M. Thierno Bocoum parlait en connaissance de cause puisque, jusqu’à son limogeage intervenu il y a de cela dix jours, il était encore le président de la commission Comptabilité et de Contrôle de l’Assemblée nationale. Une commission qui devait se faire remettre, tous les trois mois, des documents et des pièces comptables justifiant l’exécution du budget de cette même Assemblée ainsi que les dépenses effectuées. Plusieurs fois, les membres de la commission ont réclamé ces documents et pièces justificatives, et plusieurs fois, on les a envoyés sur les roses ! Même le président de l’Assemblée nationale, dûment saisi par lettre du refus des questeurs de justifier leur gestion, n’a pas jugé devoir accuser réception de cette lettre, à plus forte raison daigner lui aussi faire transmettre à la commission Comptabilité et Contrôle les documents et pièces demandés. Or, si on peut accepter que M. Thierno Bocoum, en tant que membre de Rewmi, avait quelque intérêt à « salir » l’institution parlementaire ainsi que l’ont prétendu les partisans de M. Moustapha Niasse, il se trouve qu’un autre éminent membre de cette même commission, que l’on peut difficilement soupçonner d’être de collusion avec l’opposition, a lui aussi rué dans les brancards et réclamé avec force que la questure de l’Assemblée nationale se soumette au contrôle prescrit par le règlement intérieur. Cet éminent membre n’est personne d’autre que le député Mamadou Lamine Diallo, leader du mouvement « Tekki » et incontestablement l’un des Sénégalais les plus brillants. « X-Mines », c’est-à-dire diplômé à la fois de Polytechnique France et de l’Ecole centrale des Mines, d’où sortent, avec l’ENA, les élites hexagonales, ancien directeur de cabinet du président de la Commission de l’Union Africaine, cadre à la BCEAO, Mamadou Lamine Diallo fait partie des députés constituant l’exception à la règle de la nullité généralisée de notre Parlement. Eh bien, lui aussi ne trouve pas de mots assez durs pour fustiger le refus du président de l’institution et de ses questeurs de se soumettre à tout contrôle. Pis, il accuse M. Moustapha Niasse — qui prétendait pourtant incarner la rupture ! — d’avoir mis l’Assemblée à la solde du président de la République. Rien de moins. Sans compter que, Thierno Bocoum viré de la présidence de la commission Comptabilité et Contrôle, une quasi-analphabète a été nommée à sa place. Circulez, il n’y a rien à contrôler ! Au dernier moment, nous apprenons que Mamadou Lamine Diallo lui-même, pour avoir osé critiquer la gestion opaque du président Moustapha Niasse, a été viré de son poste de la commission Comptabilité et Contrôle ! Une chose est sûre : Pour ce qui est de la rupture promise, on repassera. Le spectacle donné par nos députés lors du renouvellement du bureau de leur institution est en effet plus qu’affligeant. Une foire d’empoigne. Une querelle de bonnes femmes à la borne-fontaine du quartier — surtout que la parité est passée par là avec l’arrivée Place Soweto de bonnes femmes majoritairement analphabètes ou à peine instruites !. Des retenez-moi ou je fais un malheur. Des chantages à se désaffilier du groupe Benno Bokk Yaakaar (BBY) pour rejoindre celui en gestation que voulait former Rewmi ou pour siéger dans les rangs des non-inscrits. Des déclarations incendiaires dans la presse. Tout cela pour protester contre le fait de ne pas siéger dans le saint des saints, c’est-à-dire le bureau de l’Assemblée nationale avec ses multiples avantages dont une voiture plus luxueuse, un salaire plus consistant (plus de trois millions de francs contre 1,3 million pour le député de base), 1000 litres de carburant au lieu de 250 pour le simple député, un logement de fonction contre une misérable chambre à l’hôtel des députés pour le collègue de la masse, un bureau avec secrétaire etc. Que ne ferait-on alors pour faire partie de ce bureau de l’Assemblée ! Le comportement de nos députés est d’autant plus indécent qu’ils font quand même partie des plus privilégiés parmi les Sénégalais. En effet, même s’ils n’appartiennent pas aux happy few siégeant au bureau de l’institution de la Place Soweto, ces parlementaires ont au moins un salaire de 1.300.000 francs par mois, une voiture de marque Toyota, 250 litres de carburant par mois, une indemnité de logement de 150.000 francs — en attendant, en principe, l’achèvement de la construction de l’hôtel des députés. Mieux, innovation importante pour la présente législature, ils ont droit à des passeports diplomatiques pour leurs épouses, quel que soit le nombre de celles-là ! Bonjour les mariages blancs et les passeports diplomatiques chèrement vendus… Pour la dernière Tabaski, ils ont reçu chacun une enveloppe de 200.000 francs pour l’achat du mouton. Et ce après les 100.000 francs de la Korité. Sans compter les multiples missions à l’étranger. La République est décidément bonne fille. Avec tous ces avantages, alors que le peuple qu’ils sont censés représenter croupit dans la misère, nos députés auraient au moins dû faire preuve d’un peu de dignité. Et de décence. Au lieu de quoi, ils s’étripent joyeusement à défendre leurs petits intérêts au lieu de se faire les porte-voix des populations qui les ont mandatés dans l’hémicycle. Et si encore ils se tuaient à la tâche ! Hélas, l’Assemblée nationale est sans doute l’endroit au Sénégal où l’on travaille le moins. Et où, c’est sûr, on bénéficie le plus de privilèges ! PAR MAMADOU OUMAR NDIAYE

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